Objectifs : 1 / Connaître la notion de quiproquo 2/ Étudier la mise en place du triangle amoureux 3/ Jouer une scène de quiproquo amoureux
Suite à la « tirade du nez », Cyrano s’est battu à l’épée contre Valvert et en est sorti gagnant. Puis il s’est battu contre cent hommes et en est encore sorti gagnant. Dans cette scène, il se trouve chez le pâtissier Ragueneau, où il a rendez-vous avec Roxane. Cette dernière veut lui faire un aveu …

Film de Jean-Paul Rappenau
De 34:28 à 39:21
RECHERCHEZ DANS LE DICTIONNAIRE LA DÉFINITION D’UN QUIPROQUO
CYRANO
Non. Laissez. Mais vous, dites la chose
Que vous n’osiez tantôt me dire…
ROXANE, sans quitter sa main.
À présent j’ose,
Car le passé m’encouragea de son parfum !
Oui, j’ose maintenant. Voilà. J’aime quelqu’un.
CYRANO
Ah !…
ROXANE
Qui ne le sait pas d’ailleurs.
CYRANO
Ah !…
ROXANE
Pas encore.
CYRANO
Ah !…
ROXANE
Mais qui va bientôt le savoir, s’il l’ignore.
CYRANO
Ah !…
ROXANE
Un pauvre garçon qui jusqu’ici m’aima
Timidement, de loin, sans oser le dire…
CYRANO
Ah !…
ROXANE, achevant de lui faire un petit bandage avec son mouchoir.
Et figurez-vous, tenez, que, justement
Oui, mon cousin, il sert dans votre régiment !
CYRANO.
Ah !…
Roxane, riant.
Puisqu’il est cadet dans votre compagnie !
CYRANO.
Ah !…
ROXANE.
Il a sur son front de l’esprit, du génie,
Il est fier, noble, jeune, intrépide, beau…
CYRANO, se levant tout pâle.
Beau !
ROXANE.
Quoi ? Qu’avez-vous ?
CYRANO.
Moi, rien… c’est… c’est…
(Il montre sa main, avec un sourire.)
C’est ce bobo.
ROXANE.
Enfin, je l’aime. Il faut d’ailleurs que je vous dise
Que je ne l’ai jamais vu qu’à la Comédie…
CYRANO.
Vous ne vous êtes donc pas parlé ?
ROXANE.
Nos yeux seuls.
CYRANO.
Mais comment savez-vous, alors ?
ROXANE.
Sous les tilleuls
De la place Royale, on cause… Des bavardes
M’ont renseignée…
CYRANO.
Il est cadet ?
ROXANE.
Cadet aux gardes.
CYRANO.
Son nom ?
ROXANE.
Baron Christian de Neuvillette.
CYRANO.
Hein ?…
Il n’est pas aux cadets.
ROXANE.
Si, depuis ce matin
Capitaine Carbon de Castel-Jaloux.
CYRANO.
…Ma pauvre enfant, vous qui n’aimez que beau langage,
Bel esprit, — si c’était un profane, un sauvage.
ROXANE.
Non, il a les cheveux d’un héros de d’Urfé !
CYRANO.
S’il était aussi maldisant que bien coiffé !
ROXANE.
Non, tous les mots qu’il dit sont fins, je le devine !
CYRANO.
Oui, tous les mots sont fins quand la moustache est fine.
— Mais si c’était un sot !…
Roxane, frappant du pied.
Eh bien ! j’en mourrais, là !
CYRANO., après un temps.
Vous m’avez fait venir pour me dire cela ?
Je n’en sens pas très bien l’utilité, madame.
ROXANE.
Ah, c’est que quelqu’un hier m’a mis la mort dans l’âme, En me disant que tous, vous vous battiez Dans votre compagnie
CYRANO.
C’est bien, je défendrai votre petit baron.
ROXANE.
Oh, n’est-ce pas que vous allez me le défendre ?
J’ai toujours eu pour vous une amitié si tendre.
CYRANO.
Oui, oui.
ROXANE.
Vous serez son ami ?
CYRANO.
Je le serai.
ROXANE.
Et jamais il n’aura de duel ?
CYRANO.
C’est juré.
ROXANE.
Oh ! je vous aime bien. Il faut que je m’en aille.
(Elle remet vivement son masque, une dentelle sur son front, et distraitement.)
Mais vous ne m’avez pas raconté la bataille
De cette nuit. Vraiment ce dut être inouï !…
— Dites-lui qu’il m’écrive.
(Elle lui envoie un petit baiser de la main.)
Oh ! je vous aime !
CYRANO.
Oui, oui.
ROXANE.
Cent hommes contre vous ? Allons, adieu. — Nous sommes
De grands amis !
CYRANO.
Oui, oui.
ROXANE.
Qu’il m’écrive ! — Cent hommes ! —
Vous me direz plus tard. Maintenant, je ne puis.
Cent hommes ! Quel courage !
CYRANO, la saluant.
Oh ! j’ai fait mieux depuis.
(Elle sort. Cyrano reste immobile, les yeux à terre. Un silence. La porte de droite s’ouvre. Ragueneau passe la tête.)