Objectifs : 1/ je comprends ce qu’est la préciosité, incarnée par le personnage de Roxane 2/ Je comprends que Christian est incapable de séduire Roxane sans l’aide de Cyrano

Film de Jean-Paul Rappeneau

De 52 : 40 à 1 : 05 :50

Suite au pacte, Christian a envoyé à Roxane de nombreuses lettres d’amour, qui ont en fait été écrites par Cyrano. Les lettres en question sont pleines d’esprit et Roxane la précieuse en est absolument charmée …

Extrait de cyrano de bergerac (1659)

Roxane, sortant de la maison.

Ah ! qu’il est beau, qu’il a d’esprit et que je l’aime !

Cyrano, souriant.

Christian a tant d’esprit ?…

Roxane.

Mon cher, plus que vous-même !

Cyrano.

J’y consens

Roxane.

Il ne peut exister à mon goût
Plus fin diseur de ces jolis rien qui sont tout.
Parfois il est distrait, ses Muses sont absentes ;
Puis, tout à coup, il dit des choses ravissantes !


Cyrano, incrédule.

Non ?

Roxane.

C’est trop fort ! Voilà comme les hommes sont :
Il n’aura pas d’esprit puisqu’il est beau garçon !


Cyrano.

Il sait parler du cœur d’une façon experte ?

Roxane.

Mais il n’en parle pas, Monsieur, il en disserte !

Quelques pistes de lecture …

En quoi Christian correspond t-il à l’idéal amoureux de Roxane ? Qu’est-ce que cette dernière ne sait pas ?

Christian, prenant confiance en lui suite à ce premier succès, décide de se passer de l’aide de son acolyte et d’aller parler seul à Roxane, qui sort d’une entrevue avec les Précieuses.

(Christian à Cyrano) Je suis las d’emprunter mes lettres, mes discours,
Et de jouer ce rôle, et de trembler toujours !…
C’était bon au début ! Mais je sens qu’elle m’aime !
Merci. Je n’ai plus peur. Je vais parler moi-même.

Je ne suis pas si bête à la fin ! Tu verras !
Mais, mon cher, tes leçons m’ont été profitables.
Je saurai parler seul ! Et, de par tous les diables, Je saurai bien toujours la prendre dans mes bras !…

Extrait de cyrano de bergerac (1659)


Roxane


C’est vous !…

(Elle va à lui.)

Le soir descend.
Attendez. Ils sont loin. L’air est doux. Nul passant.
Asseyons-nous. Parlez. J’écoute.



Christian, s’assied près d’elle, sur le banc. Un silence.

Je vous aime.



Roxane, fermant les yeux.

Oui, parlez-moi d’amour.



Christian.

Je t’aime.



Roxane.

C’est le thème.
Brodez, brodez.



Christian.

Je vous…


Roxane.

Brodez !



Christian.

Je t’aime tant.



Roxane.

Sans doute. Et puis ?



Christian.

Et puis… je serai si content
Si vous m’aimiez ! — Dis-moi, Roxane, que tu m’aimes !



Roxane, avec une moue.

Vous m’offrez du brouet quand j’espérais des crèmes !
Dites un peu comment vous m’aimez ?…



Christian.

Mais… beaucoup.



Roxane.

Oh !… Délabyrinthez vos sentiments !



Christian, qui s’est rapproché et dévore des yeux la nuque blonde.

Ton cou !
Je voudrais l’embrasser !…



Roxane.

Christian !



Christian.

Je t’aime !



Roxane, voulant se lever.

Encore !



Christian, vivement, la retenant.

Non, je ne t’aime pas !



Roxane, se rasseyant.

C’est heureux.



Christian.

Je t’adore !



Roxane, se levant et s’éloignant.

Oh !



Christian.

Oui… je deviens sot !



Roxane.

Et cela me déplaît !
Comme il me déplairait que vous devinssiez laid.


Christian.

Mais…



Roxane.

Allez rassembler votre éloquence en fuite !



Christian.

Je…



Roxane.

Vous m’aimez, je sais. Adieu.

(Elle va vers la maison.)



Christian.

Pas tout de suite !
Je vous dirai…



Roxane, poussant la porte pour rentrer.

Que vous m’adorez… oui, je sais.
Non ! non ! Allez-vous-en !



Christian.

Mais je…

(Elle lui ferme la porte au nez.)



Cyrano, qui depuis un moment est rentré sans être vu.

C’est un succès.

Quelques pistes de lecture …

Qu’est-ce qui montre que, contrairement à Cyrano, Christian n’a pas compris la personnalité de Roxane ?

L’idéal amoureux de Roxane est celui des Précieuses.

Qu’est-ce que le mouvement des Précieuses ?

Au 17ème siècle, les Précieuses sont des dames nobles qui aime à se réunir dans leur chambre à coucher pour y causer de littérature et pour y écrire des poèmes d’amour. Pour ces femmes, l’amant modèle doit refléter l’idéal amoureux par ses manières raffinées, son langage plein d’esprit et une courtoisie sans égale. Toute grossièreté est condamnée. Seules la subtilité et la sensibilité doivent occuper le haut du pavé.

La carte du tendre

La carte du Tendre est la carte d’un pays imaginaire appelé “Tendre” inventé au 17ème siècle par certaines Précieuses. Sur cette carte, on trouve tracées, sous forme de villages et de chemins, les différentes étapes de la vie amoureuse.

Le discours des Précieuses

Le discours des Précieuses se veut raffiné. On fait usage de périphrases hyperboliques : les yeux sont par exemple les “miroirs de l’âme”. Certaines expressions ont subsisté dans le français actuel, comme « châtier la langue », « un billet doux », « le mot me manque », « avoir de l’esprit », « briller dans la conversation ». Mais parfois, les Précieuses en font un peu trop et sombrent dans le ridicule : c’est pourquoi Molière se moque d’elles dans “Les Précieuses ridicules”

Extrait des précieuses ridicules (1659)

Magdelon et Cathos, deux précieuses, reprochent à leur père et oncle Gorgibus de les appeler par leurs noms de baptême, qu’elles jugent vulgaires. Par ailleurs, elles refusent les projets de mariages arrangés par Gorgibus.

GORGIBUS .-  Comment, ces noms étranges ? Ne sont-ce pas vos noms de baptême ?

MAGDELON – Mon Dieu, que vous êtes vulgaire ! Pour moi un de mes étonnements, c’est que vous ayez pu faire une fille si spirituelle  que moi. A-t-on jamais parlé dans le beau style de Cathos ni de Magdelon ? et ne m’avouerez-vous pas que ce serait assez d’un de ces noms, pour décrier le plus beau roman du monde ?

CATHOS – Il est vrai, mon oncle, qu’une oreille un peu délicate pâtit furieusement à entendre prononcer ces mots-là, et le nom de Polyxène, que ma cousine a choisi, et celui d’Aminte, que je me suis donné, ont une grâce, dont il faut que vous demeuriez d’accord.

GORGIBUS. –  Écoutez ; il n’y a qu’un mot qui serve. Je n’entends point que vous ayez d’autres noms, que ceux qui vous ont été donnés par vos parrains et marraines, et pour ces Messieurs, dont il est question je connais leurs familles et leurs biens, et je veux résolûment que vous vous disposiez à les recevoir pour maris. Je me lasse de vous avoir sur les bras, et la garde de deux filles est une charge un peu trop pesante, pour un homme de mon âge.

CATHOS. – Pour moi, mon oncle, tout ce que je vous puis dire c’est que je trouve le mariage une chose tout à fait choquante. Comment est-ce qu’on peut souffrir la pensée de coucher contre un homme vraiment nu ?

Extrait des précieuses ridicules (1659)

Magdelon et Cathos rencontrent Mascarille, qui aime faire le bel esprit.

MASCARILLE, après s’être peigné – Eh bien, Mesdames, que dites-vous de Paris ?

MAGDELON. – Hélas ! qu’en pourrions-nous dire ? Il faudrait être l’antipode de la raison, pour ne pas confesser que Paris est le grand bureau des merveilles, le centre du bon goût, du bel esprit et de la galanterie.

MASCARILLE.- Pour moi, je tiens que hors de Paris, il n’y a point de salut pour les honnêtes gens.

CATHOS. – C’est une vérité incontestable.

MASCARILLE. – Il y fait un peu crotté, mais nous avons la chaise.

MAGDELON. – Il est vrai que la chaise est un retranchement merveilleux contre les insultes de la boue, et du mauvais temps.

Sauriez-vous comprendre le sens des expressions précieuses suivantes ?

Le conseiller de la beauté
Donner dans l’amour permis
L’interprète muet des cœurs

a) le papier
b) le regard
c) le corps
Le paradis des oreilles

a) le chant
b) la musique
c) le silence
Les filles de la douleur et de la joie

a) les larmes
b) les moqueries
c) l’accouchement
L’empire de Morphée

a) le lit
b) le rêve
c) le sommeil
Les chers souffrants

a) les malades
b) les souvenirs
c) les pieds
Le supplément du soleil

a) le feu
b) la lumière
c) la chandelle