Objectif : je comprends que la vengeance du magicien africain va mettre en péril la vie prospère d’Aladdin et de Badroulboudour
Grâce à sa magie, le magicien africain réalise qu’Aladdin n’est pas mort, et qu’il a découvert les pouvoirs de la lampe merveilleuse. Il décide de se venger et se rend pour ce faire en Chine, dans la ville d’Aladdin.
Le magicien africain apprend qu’Aladdin est devenu un prince
Le lendemain avant toute chose, le magicien africain voulut savoir ce que l’on disait d’Aladdin. En se promenant par la ville, il entra dans le lieu le plus fameux et le plus fréquenté par les personnes de grande distinction, où l’on s’assemblait pour boire d’une certaine boisson chaude qui lui était connue dès son premier voyage. Il n’y eut pas plutôt pris place, qu’on lui versa de cette boisson dans une tasse, et qu’on la lui présenta. En la prenant, comme il prêtait l’oreille à droite et à gauche, il entendit qu’on s’entretenait du palais d’Aladdin. Quand il eut achevé, il s’approcha d’un de ceux qui s’en entretenaient ; et en prenant son temps, il lui demanda en particulier ce que c’était que ce palais dont on parlait si avantageusement ? « D’où venez-vous, lui dit celui à qui il s’était adressé ? Il faut que vous soyez bien nouveau venu, si vous n’avez pas vu, ou plutôt si vous n’avez pas encore entendu parler du palais du prince Aladdin ? » On n’appelait plus autrement Aladdin depuis qu’il avait épousé la princesse Badroulboudour. « Je ne vous dis pas, continua cet homme, que c’est une des merveilles du monde, mais que c’est la merveille unique qu’il y ait au monde : jamais on n’y a rien vu de si grand, de si riche, de si magnifique ! Il faut que vous veniez de bien loin, puisque vous n’en avez pas encore entendu parler ! En effet, on en doit parler par toute la terre, depuis qu’il est bâti. Voyez-le, et vous jugerez si je vous en aurai parlé contre la vérité. »
Quelques pistes de lecture …
1 – À votre avis, quelle est la boisson chaude dégustée par la magicien africain ?
2 – Qu’est-ce que le magicien africain apprend sur la situation sociale d’Aladdin ?
Le magicien africain découvre le magnifique palais d’Aladdin. Il comprend que seul le génie de la lampe a pu rendre possible une telle merveille. Or, sa magie lui apprend que la lampe se trouve dans le palais d’Aladdin. Il décide alors de profiter du fait qu’Aladdin soit parti pour quelques jours à la chasse pour récupérer la lampe.
Le magicien africain invente un stratagème pour récupérer la lampe
« Voilà le temps d’agir, dit-il en lui-même, je ne dois pas le laisser échapper. » Il alla à la boutique d’un faiseur et vendeur de lampes. « Maître, dit-il, j’ai besoin d’une douzaine de lampes de cuivre ; pouvez-vous me la fournir ? » Le vendeur lui dit qu’il en manquoit quelques-unes, mais que s’il vouloit se donner patience jusqu’au lendemain, il la fournirait complète à l’heure qu’il voudroit. Le magicien le voulut bien ; il lui recommanda qu’elles fussent propres et bien polies ; après lui avoir promis qu’il le payeroit bien, il se retira dans son khan.
Le lendemain la douzaine de lampes fut livrée au magicien africain, qui les paya au prix qui lui fut demandé, sans en rien diminuer. Il les mit dans un panier dont il s’était pourvu exprès ; et avec ce panier au bras il alla vers le palais d’Aladdin, et quand il s’en fut approché, il se mit à crier :
« Qui veut changer des vieilles lampes pour des neuves ? »

Le magicien africain s’isole dans la campagne et fait apparaitre le génie
Quand il fut dans la campagne, il se détourna du chemin dans un lieu à l’écart, hors de la vue du monde, où il resta jusqu’au moment qu’il jugea à propos, pour achever d’exécuter le dessein qui l’avait amené.
Le magicien africain passa le reste de la journée dans ce lieu, jusqu’à une heure de nuit, que les ténèbres furent les plus obscures. Alors il tira la lampe de son sein, et il la frotta. À cet appel, le génie lui apparut.
« Que veux-tu, lui demanda le génie ? Me voila prêt à t’obéir comme ton esclave et de tous ceux qui ont la lampe à la main, moi et ses autres esclaves. »
« Je te commande, reprit le magicien africain, qu’à l’heure même tu enlèves le palais que toi ou les autres esclaves de la lampe ont bâti dans cette ville, tel qu’il est, avec tout ce qu’il y a de vivant, et que tu le transportes avec moi en même temps dans un tel endroit de l’Afrique. »
Sans lui répondre, le génie avec l’aide d’autres génies, esclaves de la lampe comme lui, le transportèrent en très-peu de temps, lui et son palais en son entier, au propre lieu de l’Afrique qui lui avait été marqué. Nous laisserons le magicien africain et le palais avec la princesse Badroulboudour en Afrique, pour parler de la surprise du sultan.

Le sultan est fou de rage contre Aladdin, car il pense que c’est ce dernier qui a fait enlever le palais et la princesse Badroulboudour. Lorsque son gendre rentre enfin de la chasse, il décide de lui faire couper la tête.
Aladdin et la vengeance du sultan
Quand le bourreau se fut saisi d’Aladdin, il lui ôta la chaîne qu’il avait au cou et autour du corps ; et après avoir étendu sur la terre un cuir teint du sang d’une infinité de criminels qu’il avait exécutés, il l’y fit mettre à genoux, et lui banda les yeux. Alors il tira son sabre, il prit sa mesure pour donner le coup, en s’essayant et en faisant flamboyer le sabre en l’air par trois fois, et il attendit que le sultan lui donnât le signal pour trancher la tête d’Aladdin.
En ce moment, le grand vizir aperçut que la populace venait d’escalader les murs du palais en plusieurs endroits, et commençait à les démolir pour faire brèche. Avant que le sultan donnât le signal, il lui dit : « Sire, je supplie votre Majesté de penser mûrement à ce qu’elle va faire. Elle va courir risque de voir son palais forcé ; et si ce malheur arrivait, l’événement pourroit en être funeste. » « Mon palais forcé, reprit le sultan ! Qui peut avoir cette audace ? » « Sire, repartit le grand vizir, que votre Majesté jette les yeux sur les murs de son palais et sur la place, elle connaîtra la vérité de ce que je lui dis. »
L’épouvante du sultan fut si grande quand il eut vu une émeute si vive et si animée, que dans le moment même il commanda au bourreau de remettre son sabre dans le fourreau, doter le bandeau des yeux d’Aladdin, et de le laisser libre.
Alors tous ceux qui étaient déjà montés au haut des murs du palais, témoins de ce qui venait de se passer, abandonnèrent leur dessein. Ils descendirent en peu d’instants, et pleins de joie d’avoir sauvé la vie à un homme qu’ils aimaient véritablement, ils publièrent cette nouvelle à tous ceux qui étaient autour d’eux ; elle passa bientôt à toute la populace qui était dans la place du palais. La justice que le sultan venoit de rendre à Aladdin en lui faisant grâce, désarma la populace, fit cesser le tumulte, et insensiblement chacun se retira chez lui.
Quand Aladdin se vit libre, il leva la tête du côté du balcon ; et comme il eut aperçu le sultan : « Sire, dit-il en élevant sa voix d’une manière touchante, je supplie votre Majesté d’ajouter une nouvelle grâce à celle qu’elle vient de me faire, c’est de vouloir bien me faire connaître quel est mon crime. » « Quel est ton crime, perfide, répondit le sultan, ne le sais-tu pas ? Monte jusqu’ici, continua-t—il, je te le ferai connaître. »
Aladdin monta, et quand il se fut présenté : « Suis-moi, lui dit le sultan, en marchant devant lui sans le regarder. Il le mena jusqu’au cabinet ouvert ; et quand il fut arrivé à la porte : « Entre, lui dit le sultan ; tu dois savoir où était ton palais, regarde de tous côtés, et dis-moi ce qu’il est devenu. »
Aladdin regarde, et ne voit rien ; il s’aperçoit bien de tout le terrain que son palais occupait ; mais comme il ne pouvait deviner comment il avait pu disparaître, cet événement extraordinaire et surprenant le mit dans une confusion et dans un étonnement qui l’empêchèrent de pouvoir répondre un seul mot au sultan.
Le sultan impatient : « Dis-moi donc, répéta-t-il à Aladdin, où est ton palais, et où est ma fille ? » Alors Aladdin rompit le silence. « Sire, dit-il, je vois bien, et je l’avoue, que le palais que j’ai fait bâtir n’est plus à la place où il était, je vois qu’il a disparu, et je ne puis dire à votre Majesté où il peut être ; mais je puis l’assurer que je n’ai aucune part à cet événement. »
« Je ne me mets pas en peine de ce que ton palais est devenu, reprit le sultan, j’estime ma fille un million de fois davantage. Je veux que tu me la retrouves, autrement je te ferai couper la tête, et nulle considération ne m’en empêchera. »
« Sire, repartit Aladdin, je supplie votre Majesté de m’accorder quarante jours pour faire mes diligences ; et si dans cet intervalle je n’y réussis pas, je lui donne ma parole que j’apporterai ma tête au pied de son trône, afin qu’elle en dispose à sa volonté. » « Je t’accorde les quarante jours que tu me demandes, lui dit le sultan ; mais ne crois pas abuser de la grâce que je te fais, en pensant échapper à mon ressentiment : en quelqu’endroit de la terre que tu puisses être, je saurai bien te retrouver. »